François-Xavier Turbet-Delof est directeur adjoint Développement-Qualité des établissements des Petits Frères des Pauvres.
Pourquoi vouloir intaller des équipements numériques dans les établissements des Petits Frères des Pauvres ?
C’est important que les personnes âgées, même les plus fragiles, fassent entièrement partie de notre société et puissent accéder aux mêmes technologies, aux mêmes niveaux d’information et de communication que les autres.
Il faut aussi leur donner les moyens de pouvoir faire face aux évolutions qui s’imposent à nouveau, comme la dématérialisation des démarches administratives. Il existe un certain nombre d’EHPAD qui proposent des ateliers numériques mais on constate que la difficulté est de passer d’une phase de sensibilisation et d’usage collectif à un usage individuel.
C’est vraiment ce passage là que nous avons envie de faire franchir aux personnes accompagnées dans nos établissements. De passer du stade de l’information, de la sensibilisation, éventuellement du « faire avec eux » au stade d’une certaine autonomie spontanée.
Les premiers retours que nous avons sur nos expérimentations, ce sont des personnes qui sont dans le refus au premier abord, « ça ne m’intéresse pas, je n’en ai pas besoin, je ne suis pas capable » et qui arrivent à franchir cette barrière quand on leur donne envie. En général, cette première étape passe par des approches très simples et ludiques. C’est souvent par le ludique qu’on apprend le mieux. Qu’il y ait du plaisir à découvrir, du plaisir à apprendre.
C’est essentiel de susciter l’envie, de montrer aux personnes qu’elles sont capables. Quand on se sent en difficulté, le premier réflexe, c’est de dire « ce n’est pas pour moi ». Une fois cette première étape franchie, il est plus facile de travailler sur quelque chose de plus approfondi pour un usage personnel.
Quelles vont être les spécificités de cet univers « web-friendly » ?
Nous sommes là pour mettre le pied à l’étrier et pour permettre aux personnes que nous accompagnons de connaître l’usage mais aussi le réseau qu’il y a autour. Aujourd’hui, notre société fonctionne beaucoup en communautés d’intérêts alors que l’on n’arrête pas de parler d’individualisme.
Notre expérimentation permet aussi d’établir de façon simple des liens entre résidents de l’établissement, des résidents des autres établissements, et des contacts extérieurs comme des membres de la famille ou des amis. Cette création de réseau est une dimension importante sinon l’intérêt de la personne risque de s’étioler. Sans interconnexion, sans interactivité, les personnes risquent de perdre l’intérêt qu’elles avaient trouvé, et c’est important de réintroduire les personnes âgées dans une dynamique de communauté.
Etre dans la vie, c’est être dans des cercles d’appartenance. Je pense par exemple à une dame que nous accompagnons qui est passionnée de Scrabble. Peut-être que l’accès au numérique va lui permettre de trouver d’autres passionnés pour jouer avec elle.
Pour permettre à nos aînés de maintenir leurs liens sociaux grâce aux outils numériques et à Internet, les Petits Frères des Pauvres émettent 14 recommandations contre l’exclusion numériques des personnes âgées.