Des visites chronométrées, sur rendez-vous, dans des salles communes… Le cadre ne fait pas rêver mais c’est ce que doivent désormais appliquer les Ehpad qui disposent désormais également d’une charte pour « protéger sans isoler ». Depuis la diffusion du nouveau plan de lutte contre l’épidémie dans les établissements médicaux-sociaux (01/10/2020), les Ehpad ont désormais un cadre commun pour l’instauration des règles qui préservent la santé tout en maintenant un minimum d’interactions sociales.
Il y est notamment indiqué que dans les zones où le virus circule activement, il est fortement recommandé de « réactiver les visites sur rendez-vous organisées prioritairement dans un espace extérieur ou dans un espace dédié ». Pour les personnes seules, les bénévoles peuvent assurer ces visites, une vraie reconnaissance de la place des bénévoles auprès de nos aînés et dans la lutte contre l’isolement. Les sorties sont toutefois limitées à des situations exceptionnelles. Il est bien noté que l’ensemble de ces règles doit être discuté avec le Conseil de Vie Sociale de l’établissement dont font partie des représentants des résidents, des familles et du personnel de l’Ehpad : une preuve de la prise en compte de l’avis des personnes âgées dans les décisions qui les concernent.
L’enfermement et les privations : nos aînés souffrent
Mais si les protocoles ont été allégés dans l’ensemble, la situation reste très difficile à vivre pour les personnes âgées, déjà éprouvées par le confinement : « Je suis dans une maison de repos où les visites sont aujourd’hui très réglementées. On a le droit à une visite par semaine, d’une demi-heure. C’est ridicule ! On est vraiment emprisonnés. Il y a un manque de liberté, il faut se priver de beaucoup de choses, ça fait mal. On ne peut pas faire ce qu’on veut, on est comme des gosses, on est puni, au piquet ! », s’exclame Louise, 77 ans, hospitalisée dans une maison de repos à Lyon dont le département est placé en zone rouge renforcée.
On a le droit à une visite par semaine, d’une demi-heure. C’est ridicule ! On est vraiment emprisonnés.
Pour les Petits Frères des Pauvres, ce témoignage montre bien à quel point l’isolement social est une souffrance. Pour les plus fragiles, il peut conduire à un renoncement à vivre. C’est pour cette raison, que notre Association a tenu rappeler, lors de notre participation à un séminaire de travail aux côtés de Brigitte Bourguignon, ministre chargée de l’autonomie qui a aboutit à la charte « protéger sans isoler », que les Ehpad sont des lieux de vie et que toute restriction de libertés doit être proportionnée. C’est pourquoi, les Petits Frères des Pauvres s’opposent aux décisions de fermeture d’Ehpad à titre préventif (sans cas suspect de Covid-19).
Maintenir le lien social coûte que coûte
Avant la mise en place de ce plan, nombreux ont été les Ehpad qui ont reconfiné à titre préventif ou durci leurs règles de visites sans protocole, au cas par cas. Les Petits Frères des Pauvres ont lancé un questionnaire en ligne auprès des responsables d’équipe bénévoles et des salariés en septembre 2020 afin de mieux comprendre comment se déroulaient les visites des bénévoles actuellement et il en ressort que la situation sanitaire avait conduit les personnes âgées résidant en Ehpad à abandonner leurs projets de vacances (63 %). Dans la majorité des cas, ce sont les EHPAD qui ont refusé ou dissuadé tout départ en séjour (34 %) par crainte de fortes contaminations au retour de vacances.
Malgré tout, nos équipes ont tout fait pour maintenir le lien social avec les personnes âgées hébergées en Ehpad, par téléphone ou en se rendant dans les Ehpad pour les apercevoir au travers d’une vitre, comme en témoigne une bénévole : « J’appelle la personne que j’accompagne par téléphone pour lui dire que je passerai devant l’Ehpad vers une heure donnée. Elle vient avec son fauteuil électrique devant les portes vitrées de l’établissement et on communique, on se voit et on se parle à travers les vitres. Cela fait du bien ! Cela lui donne l’impression d’avoir un peu truandé et de retrouver un semblant de liberté ».
Ainsi, nos répondants affirment à 47 % que les visites se passent « assez bien » depuis juin 2020 dans les Ehpad concernés -le lien est d’ailleurs facilité lorsque des partenariats solides existent entre Ehpad et associations-, et à 34 % « difficilement », chacun tente de s’adapter pour garder le lien avec nos aînés tout en préservant leur santé.