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Covid-19 : l’arrêt des visites en Ehpad était-il une forme de maltraitance ?

Les Petits Frères des Pauvres alertent sur l’invisibilité des personnes âgées et l’importance du respect des libertés individuelles jusqu’au bout de la vie. © sabthai_ shutterstock.com
Les Petits Frères des Pauvres alertent sur l’invisibilité des personnes âgées et l’importance du respect des libertés individuelles jusqu’au bout de la vie. © sabthai_ shutterstock.com

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Pendant la crise sanitaire du coronavirus, les mesures prises dans les Ehpad ont privé les personnes âgées de tout lien social. Certaines mesures, appliquées sans discernement, ont confiné à une forme de maltraitance. À l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la maltraitance des personnes âgées le 15 juin, les Petits Frères des Pauvres alertent sur l’invisibilité des personnes âgées et l’importance du respect des libertés individuelles jusqu’au bout de la vie.

« Malgré des contacts réguliers par Skype, j’ai vu l’état psychologique de ma mère se dégrader considérablement, elle qui est habituellement gaie et aimant échanger avec les autres. L’isolement sensoriel, l’absence de contacts visuel et tactile, c’est la pire des tortures psychologiques », c’est le cri du cœur de Jérôme, médecin retraité et dont la mère est pensionnaire d’un Ehpad dans la banlieue de Rouen (Seine-Maritime) dans le Quotidien du Médecin. Pour lui, les « mesures drastiques d’enfermement et tous les interdits les accompagnant » qui ont été prises dans les Ehpad durant le confinement ont causé de graves dégâts chez les personnes âgées, dont des souffrances psychologiques. Ces souffrances psychologiques pourraient être assimilées à des maltraitances. C’est l’alerte que lancent de nombreux citoyens, professionnels mais aussi les Petits Frères des Pauvres. Finalement, les mesures prises pour protéger nos aînés du coronavirus auraient-elles été maltraitantes pour eux ? 

« Au sein de l’Association, nous nous appuyons sur les repères suivants pour qualifier une situation de maltraitance : « une violence dans un contexte de relation de confiance avec une personne vulnérable qui génère de la détresse. ». Dans cette perspective, la brutalité de la rupture de tous les liens (familiaux, sociaux) de personnes résidant en Ehpad peut être vécue comme une violence et ce, d’autant plus que les Ehpad ont interdit les visites avant même le confinement général de la population », expliquent Sylvie Lattanzi et Magali Assor, de la cellule Lutte contre les maltraitances des Petits Frères des Pauvres

Par ailleurs, « l’application d’un cadre privatif de liberté à des personnes qui, par leur état de vulnérabilité, ne sont pas en capacité de se défendre et de le contester peut être regardé au travers du prisme de la maltraitance. Du jour au lendemain, des personnes âgées n’ont plus revu leur entourage et certaines sont décédées seules sans leurs proches. Cette violence fait maltraitance », poursuivent-elles.

La brutalité de la rupture de tous les liens (familiaux, sociaux) peut être vécue comme une violence

Des mesures restrictives en Ehpad

Certains pourraient faire remarquer que ces mesures étaient vitales et ont été prises uniquement pour la sécurité des personnes âgées, non pas dans un but intentionnel de leur nuire. Toutefois, le conseil consultatif national d’éthique a mentionné que le respect de la dignité inclut le maintien d’un lien social. Il a aussi rappelé la base de ce qu’est l’éthique à savoir que l’on ne peut pas prendre des mesures si contraignantes et les appliquer de façon générale et non contextualisée. 

« On voit aujourd’hui que des alternatives auraient pu être mises en place en Ehpad. Par exemple, les visites auraient été possibles si les personnels, les personnes âgées et les visiteurs avaient été pourvus du matériel de protection approprié. Certains Ehpad ont appliqué le confinement en chambre à tous les résidents de façon indifférenciée, sans prêter attention à l’état de santé, la capacité et le discernement des personnes. », détaille Magali Assor, chargée de projet éthique au sein des Petits Frères des Pauvres.

Les mesures prises en Ehpad pour protéger les personnes âgées ont provoqué une rupture brutale de tout lien social. © Alonafoto_shutterstock

À domicile, les personnes âgées plus libres ?

Si à domicile, les personnes âgées pouvaient, en principe, prendre la décision de sortir une heure par jour, elles pouvaient aussi être confrontées à des situations de violence. Celles des violences intrafamiliales (maltraitances psychologiques, physiques, financières…), dont on a très peu parlé, ont pu être exacerbées pendant le confinement car les cohabitations contraintes (enfants ou petits-enfants dans des situations précaires qui reviennent vivre au domicile des aînés) génèrent des tensions au quotidien. 

Que cela soit à domicile ou en Ehpad, « il peut être intéressant de réfléchir aux conditions qui ont rendu possible l’acceptation générale de l’enfermement des personnes âgées, les commentaires violents qui ont circulé à leur encontre sur les réseaux sociaux. Tout ceci a pu se mettre en place très vite parce qu’il y avait une sorte d’acceptation sociale à l’idée de fermer les Ehpad », témoigne Magali Assor.

Pour notre Association, ces situations de maltraitances ont aussi été rendues possibles parce que les personnes âgées sont devenues invisibles aux yeux de la société et qu’elles sont très silencieuses. En effet, la société a accepté plus facilement ces mesures restrictives qui privaient des citoyens qu’on voyait déjà peu mais aurait-elle réagit pareil si elles concernaient des étudiants ?

Pour que les personnes âgées ne soient #PlusJamaisInvisibles, les Petits Frères des Pauvres lancent un manifeste. Signez-le et partagez-le.

 

 

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Audrey Achekian
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