Pamela Anderson, 56 ans, sans maquillage à la Fashion Week ce début octobre et c’est l’effervescence. En France comme Outre-Atlantique, une vague de commentaires a déferlé pour la féliciter de son « courage » ou au contraire critiquer son geste en lui reprochant de faire plus vieille que son âge ou d’être superficielle.
Il y a quelques mois, la chanteuse Lio avait aussi fait les frais de ces remarques âgistes en arrêtant de se colorer les cheveux : « Il y a quelques années, j’ai commencé à avoir vraiment beaucoup de cheveux blancs. Alors j’ai laissé venir tranquillement sans trop me poser de questions sur le regard des gens et sur d’éventuelles réprobations » expliquait-elle dans l’Obs en 2017. « Ce n’était pas pour partir dans un discours idéologique sur l’âge, le regard sur la femme. Mais ça l’est devenu. C’est une manière de montrer cette pression continue sur les femmes ».
Pourtant, de plus en plus de femmes osent afficher rides, cheveux blancs et absence de maquillage. Parmi elles, quelques célébrités qui ouvrent la voie et invitent à s’accepter comme on est.
Une injonction au jeunisme imposée aux femmes
Mais souvent, ces exemples bousculent la société et se confrontent à des préjugés. L’exemple de Lio dont les filles l’ont au départ suppliée de pas se « laisser aller » est symptomatique : comme si, accepter de vieillir, était synonyme de négligence…
Pour Sophie Fontanel, journaliste et auteure qui a osé elle-aussi les cheveux gris, les avis défavorables viennent avant tout d’un problème de « représentation de la féminité ». Elle évoque même cette sorte d’injonction au jeunisme imposée aux femmes.
Rester figée dans une éternelle jeunesse, toujours belle et pimpante, c’est le sort réservé aux femmes ? Une interdiction de vieillir liée à plusieurs idées reçues véhiculées depuis toujours. Mona Chollet, journaliste au Monde diplomatique et auteure de « Sorcières, la puissance invaincue des femmes » révèle : « Si les femmes sont réputées se flétrir avec le temps quand les hommes se bonifient, c’est largement parce que ces représentations hantent nos imaginaires, des sorcières de Goya à celles de Walt Disney ».
Les femmes sont aussi tenues d’être belles et désirables parce qu’elles doivent enfanter… « Prendre de l’âge, c’est réveiller la peur que suscite toujours une femme lorsqu’elle n’existe pas uniquement pour créer d’autres êtres et prendre soin d’eux. », interpelle l’activiste Cynthia Rich.
À partir du moment où on est une femme âgée, on devient invisible dans tout un tas d’espaces.
Si le vieillissement masculin est valorisé et associé à la maturité, la sagesse ou encore le charisme, le vieillissement féminin est majoritairement perçu négativement car les femmes sont souvent réduites à leur apparence physique, et leur valeur sociale diminue avec l’âge. Les hommes vont occuper des rôles d’influence tandis que les femmes qui ne s’occupent plus d’enfants perdent leur « utilité sociale » et sont invisibilisées.
« Les questions de sexisme et d’âgisme se cumulent clairement : à partir du moment où on est une femme âgée, on devient invisible dans tout un tas d’espaces. Ce n’est pas un hasard si beaucoup d’entreprises sont dirigées par des gens âgés. La vieillesse de certains types de mecs est encore associée au pouvoir. », affirme Juliette Jérôme Pellissier, psychothérapeute, auteure et intervenante dans la 2e saison de notre podcast Même pas Mort ! sur l’âgisme.
Changer de regard sur la vieillesse
L’une des conséquences, c’est que la présence des personnes âgées au cinéma, dans les médias ou encore à la télévision est largement sous-estimée. Les actrices âgées sont quasi-inexistantes dans le cinéma ou limitées à des seconds rôles. Les rôles de patriarches ou duo d’hommes sont fréquents mais ceux de matriarches se font rares. Pour l’historienne du cinéma Geneviève Sellier, cela tient au fait « qu’à la femme revienne la notion de désir, à l’homme celles du rôle social et de la réussite professionnelle, donc de l’âge ».
Pour que nos représentations changent, il est donc important que les femmes âgées soient pleinement mises en avant dans les médias et le 7e art. « Des femmes avec des cheveux blancs, il y en a plein. Des femmes avec des rides, il y en a plein. Mais on ne les voit pas vraiment au cinéma. On commence à les voir dans la mode. On ne les voit pas en couverture des magazines. », déplore Sophie Fontanel sur France Info (29/09/2023).
Le domaine de la politique a aussi du chemin à faire… Le peu de représentativité des femmes (qui plus est âgées) dans nos instances montre bien à quel point le plafond de verre est difficile à briser. Et quand elles y parviennent, gare à elles… On se rappellera notamment la campagne présidentielle de 2008 portée par Hillary Clinton, qui était soit discréditée par son mariage, soit par le fait qu’elle allait vieillir. C’est d’ailleurs l’odieuse remarque que lui avait faite Rush Limbaugh, conservateur et animateur radio le plus écouté des États-Unis d’Amérique « Est-ce que ce pays a vraiment envie de voir une femme vieillir sous ses yeux jour après jour ? ».
Alors, acceptons de vieillir naturellement et brisons nos idées reçues sur la vieillesse !
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