Les aînés des quartiers populaires prennent la parole
Dans l’imaginaire collectif, les banlieues sont automatiquement associées à la jeunesse. Pourtant, ces quartiers vieillissent : la part des personnes de plus de 60 ans dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPPV), est la seule en hausse constante depuis les années 90 et elle représente désormais plus de 18 % des habitants de ces territoires.
Face à cette réalité éloignée du bruit médiatique et ignorée des politiques publiques, les Petits Frères des Pauvres ont recueilli la parole de nos aînés vivant dans les quartiers populaires. L’objectif est de remettre sur le devant de la scène une population oubliée et dont le sort semble n’inquiéter personne.
Précarité, isolement, mobilité, santé, adaptation des logements… autant de sujets sur lesquels ces hommes et femmes témoignent, exprimant à la fois leurs difficultés et leurs espoirs.
Vieillir en banlieue, la triple peine : pauvreté, isolement et perte d’autonomie
Dans les témoignages recueillis, un constat s’impose : vieillir en banlieue, c’est le plus souvent cumuler les difficultés. Les infrastructures mal entretenues, l’absence de services adaptés aux personnes âgées, la précarité grandissante et l’isolement croissant sont autant de freins à une vieillesse digne et sereine.
Je souffre de solitude. Je ne peux pas sortir de mon logement, étant sous oxygène et marchant très difficilement. Kamel, 62 ans
Mon bailleur me dit qu’il n’a pas de budget pour les travaux. Sarah, 63 ans
Un accès aux droits et services compliqué
Les aînés des quartiers populaires sont confrontés à des difficultés spécifiques :
- Un logement inadapté : trop souvent en étage sans ascenseur, difficile à aménager voire vétuste.
- Un accès aux soins limité : désertification médicale, difficultés à se déplacer.
- Une solitude pesante : éclatement des familles, manque de structures adaptées, peu d’initiatives locales pour créer du lien.
Ce qui manque dans le quartier : la convivialité, la spontanéité, l’attention des autres envers nous. Renée, 80 ans
Être isolé, c’est pas facile. Je suis dans une prison vivante. Hamid, 73 ans
Quelle est la place de nos aînés dans les quartiers populaires ?
Alors que les villes se modernisent et que les quartiers se transforment, la question de la prise en charge du vieillissement dans ces espaces reste en suspens.
Le discours médiatique focalisé sur « les jeunes des banlieues » occulte une réalité pourtant très concrète : les « vieux de banlieue » sont le seul groupe d’âge dont la proportion augmente dans les quartiers populaires et leurs conditions de vie matérielle et affective se dégradent dans un silence inquiétant. Ils sont les grands oubliés des politiques publiques alors qu’ils sont pour beaucoup dans des situations de grande précarité.
Je suis au 4e étage et il n’y a pas d’ascenseur. Je n’ai plus la force de gravir les 4 étages. David, 80 ans
Je veux rester autonome le plus longtemps possible dans mon logement mais la douche est inadaptée, les prises de courant ne sont pas à la hauteur souhaitée et le balcon est compliqué d’accès. Luce, 79 ans
Pourtant, plusieurs solutions existent comme l’atteste le volet « préconisations » de notre rapport : logements adaptés, accès simplifié aux soins, services de proximité, espaces de convivialité intergénérationnels.
L’association des Petits Frères des Pauvres s’engage à porter les revendications de nos vieux de banlieue auprès des pouvoirs publics pour que leur voix soit enfin entendue.
Les chiffres à retenir
- 137 personnes âgées de 52 à 100 ans, habitant en France métropolitaine, Guadeloupe et Martinique, ont participé à cette enquête. 66 % sont des femmes.
- 93 % des répondants sont locataires. 81 % habitent en habitat social. 70 % habitent en QPV
- 79 % des répondants ayant indiqué leurs revenus vivent sous le seuil de pauvreté.
- Fait marquant : 40% des répondants déclarent n’être pas autonomes en dehors de leur logement
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